Extracte d' Una educació francesa. El llibre ha arribat a les llibreries el 12 de març
Каждую ночь я вижу во сне дом, в котором я жил, когда был ребёнком.
Ningú no pot assegurar que ha arribat per atzar a Briançon. Tolerada en un raconet de la vall del Durença, voltada per tres colls, la ciutat es mereix.
J’y ai passé ma première enfance de 1965 jusqu’à 1969. Nous habitions en haut du Champ de Mars sur la route d’Italie, dans un immeuble gris et massif de quatre étages, à côté d’une patinoire. Je jouais sur le trottoir devant chez moi. J’adorais inonder les colonnes de fourmis avec mon urine, presque autant que de regarder les aventures de Zorro à la télévision.
Mon pare m’amenait au glacis du Champ de Mars où je glissais avec une vieille luge.
Quand il ne neigeait pas, je jouais dans le petit square à l’ombre des remparts et de la cathédrale. Je me rappelle très bien la ville.
Une rigole —la Grande Gargouille —dévale la grand-rue. En bas à droite se trouvait la bibliothèque. Bien que je ne sache pas encore lire, les rares lecteurs m’intéressaient, absorbés derrière les lumières tamisées et les murs tapissés de vert comme au temps des tsars. Un vert intense. A cinq minutes, il y avait ma première école: Carlhian-Rippert… Je me souviens bien de la cour, des toilettes avec des portes en bois peintes en vert, décrépites. Le même vert que dans la bibliothèque. Mon école hivernait sur une falaise. Un sentier abrupt, à travers un bois touffu, conduisait au parc de la Schappe où j’aimais regarder les paons en cage.
Quand je feuillette des biographies illustrées de Lermontov, je reconnais ma première école dans ces estampes romantiques du Caucase. Sous la falaise coule la Durance. ‘ Lo mistrau, lo Parlament e la Durença son li tres flèus de la Provença ‘ dit un proverbe provençal.
La Durance traverse ce quartier triste, insignifiant malgré le parc de la Schappe qui me semblait immense. Les paons y faisaient la roue.
Les boutiques immémoriales proposent les mêmes articles qu’autrefois, soigneusement rangés dans des tiroirs en bois qui sentent l’encaustique. Les marmottes en peluche sifflent comme jadis.
A quatre ans, j’étais devenu l’ami du fils du lieutenant Haoun, d’origine algérienne. Plus patriote que les Français de France, il avait vêtu son fils d’un petit uniforme de parachutiste. Comme j’avais envie de porter cette tenue! Comme j’aurais aimé avoir la même !
Je me vois encore avec eux sur le stade de Briançon, très près de la gare.
Au sud de la ville, la vallée s’élargit vers la Provence. Un matin d’été, je partirai de Briançon en voiture, dans les mêmes conditions qu’en 1969, et je descendrai jusqu’à Perpignan.
J’achèterai un jeu de Monopoly dans une vieille station-service. Je visiterai la cathédrale Notre Dame d’Embrun avec mon ami Centini. Nous déjeunerons ensemble sur la terrasse des Flots Bleus, un restaurant de Savines qui surplombe le lac de Serre-Ponçon . Les serveuses y rivaliseront de beauté. Je quitterai mon ami devant la gare d’Embrun et nous repartirons pour le pays de notre solitude.
Je veux revoir une vue merveilleuse. Une colline pleine de coquelicots, avec un bosquet. Je ne sais pas où elle se trouve. En Provence ? Après Sète ? Peut-être, un lotissement aux maisons pas chères ou un supermarché ont-ils fauché les coquelicots qui brillent encore dans ma mémoire comme une vieille chanson à moitié oubliée.