posté le 01-11-2022 à 18:27:50
Gastonades automnales
Quand le spectacle du présent l'angoissait trop, Gaston relisait les aventures de Jacques Le Gall.
Gaston se demandait souvent s'il était catholique moins par inclination profonde que par l'histoire et la géographie.
Gaston eût aimé que son père lui souhaitât son anniversaire de temps à autre, ne fût-ce qu'une fois tous les dix ans.
Une nuit Gaston se réveilla en sursaut. Il décrocha son téléphone et entendit ce message: " C'est votre conscience. Pensez au salut de votre âme!"
En l'an soixantième de son âge, Gaston avait pris la résolution d'oublier les gens qui se prétendaient ses amis et n'étaient jamais disponibles.
Quand
Gaston apprit que Patrick Mcnee, le plus British des Anglais, avait été
naturalisé américain, il se dit qu'on ne pouvait plus se fier à
personne.
Gaston ne ferait pas comme les trois sœurs et il espérait revoir Moscou avant de mourir.
Gaston possédait une très belle encyclopédie en russe sur Lermontoff qu'il ne lirait jamais faute de maîtriser la langue.
Gaston connaissait peu de mélodies aussi mélancoliques que la musique du Troisième Homme.
Rater sa vie, rien de plus facile pour un romancier - songeait Gaston- mais réussir sa mort, c'était une autre paire de manches.
Gaston
se demandait quelle prochaine langue il étudierait. Le nahuatl
classique ou l'égyptien ancien. Il avait le sens des priorités.
Gaston trouvait qu'il avait un air de Cary Grant.
Revoir en rêve les gens que l'on a aimés c'est bien, mais quelle piètre consolation.
Pour
Gaston tout allait mal depuis que la France avait perdu l'Algérie.
Malheureusement cette date fatidique coïncidait à un an près avec sa
naissance.
Bien que leur cause fût détestable, Gaston trouvait les uniformes des officiers sudistes plus seyants que ceux de leurs homologues yankee.
Gaston
se souvenait que, dans sa jeunesse, seuls les matafs, les anciens
bagnards et les légionnaires en goguette portaient des tatouages.
Gaston n'irait jamais à New-York à cause de son acrophobie.
Quand
la mamet s'aperçut que le petit Gaston comprenait le provençal, elle
l'envoya au jardin rapporter les conversations du papet avec des invidus
louches. Flatté qu'on reconnût ses compétences, Gaston ne saisit pas
sur le moment le côté déplaisant du cafardage.
Il y a longtemps que Gaston n'attendait plus rien de la vie et du vit.
Gaston
savait que l’imagination est parfois plus forte que la réalité. Ainsi
le café Pouchkine de Moscou n’exista t-il longtemps que dans la chanson
de Bécaud avant que l’on n’en construisît un pour satisfaire les
touristes francophones
Pour Gaston, la situation en Ukraine était simple: quitte ou rouble.
Gaston était démodé. Il aimait tendrement les siens.
Au temps de sa folle jeunesse, Gaston rêvait au grand amour. À présent il n'aspirait plus qu'à obtenir une carte de stationnement pour handicapés.