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Titre du blog : Can Mitrofan, el blog de Joan-Daniel Bezsonoff
Auteur : Mitrophane
Date de création : 05-03-2009
 
posté le 18-11-2018 à 13:43:04

Gaston et la presse

 

 

 

Quand il était petit, Gaston aimait déjà la presse. Outre le journal régional de la province où son père était en garnison, le petit Gaston lisait les revues auxquelles étaient abonnés ses parents : Terre Air Mer, le magazine des armées ; La Revue Historique des Armées ; Le Point. Sa passion pour l’histoire lui vint sans doute de la lecture assidue d’Historia, de ses suppléments et des collections spéciales des éditions Tallandier comme La Guerre d’Algérie, Le Journal de la France et Les Combats d’Israël.

Son père, qui professait un mendésisme indéfectible et surprenant chez un officier supérieur, lisait Le Monde. Gaston trouvait ce journal sans photographies très austère et ne commença à l’apprécier que vers sa quinzième année.

L’été chez son papet Baptistin à Pampérigouste, il subissait la double influence contradictoire du Pèlerin et de l’Agri, journal agricole des Pyrénées Orientales (un pays frère de la Provence) que recevait son grand-père qui aimait son métier de paysan et souhaitait se tenir au courant des améliorations techniques.   

Quand le Tour de France escaladait le Ventoux, Gaston accompagnait le papet sur les pentes mythiques. La caravane lançait des gadgets, des stylos, des casquettes, des journaux sportifs et des numéros de Ciné Revue, où apparaissaient des actrices dénudées. Gaston avait été émerveillé par la beauté de Corinne le Poulain, de Jayne Mansfield, de Gina Lollobrigida et de Catherine Rosier. Le papet, très dévot, lui avait ordonné de jeter ’ aquelei salopariás ‘,  

À l’avant-dernière page de l’Agri on pouvait admirer des jeunes femmes légères et court vêtues. Gaston n’oublierait jamais le tableau de deux jeunes Australiennes se rendant sur un champ de courses en petite tenue avec un porte-jarretelles exquis. Ah, les splendides créatures ! Élevé dans un catholicisme strict, presque espagnol bien que son père fût un fameux lapin, Gaston n’avait aucun contact avec la gente féminine. Il se consolait en feuilletant le catalogue de la Redoute et Télé 7 jours. Faute de mieux, il lisait Le Point, hebdomadaire issu d’une hérésie d’anciens journalistes de L’Express. Le Point était moins docte, plus moderne, plus agile que l’Express, navire amiral vieillissant qu’il feuilletait chez Cyrille, le coiffeur.

Bien qu’il se crût encore de gauche, Gaston était agacé par l’idéologie du Nouvel Observateur, un des journaux responsables de la perte de l’Algérie. Gaston détestait ces bourgeois infatués qui se donnaient le grand frisson en rêvant à Pol Pot et au Che. Leurs goûts musicaux, littéraires, cinématographiques le débectaient. Seul Bernard Frank trouvait grâce à ses yeux. Sans le savoir, Gaston galopait derrière les hussards. Il ne lui restait plus qu’à découvrir les romans de Montherlant.